L’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse a présenté mardi 15 novembre son bilan dédié à la qualité de l’eau. Une présentation qui intervenait au lendemain de l’annonce par la Première ministre Elisabeth Borne d’un renforcement des moyens alloués aux agences de l’eau de 100 millions d’euros, dont 40% pour l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.
62% des rivières en Provence-Alpes-Côte d’azur se portent bien. C’est le constat qui ressort des cinq millions d’analyses effectuées par l’agence de l’eau au cours de la dernière année. « Contrairement à ce que l’on pourrait penser, nos eaux sont en bon état », commence par relever Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, à Marseille ce mardi 15 novembre aux côtés de la directrice de l’antenne locale Annick Mièvre et du directeur régional de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) de Provence-Alpes-Côte d’Azur Sébastien Forest. Cette affirmation s’appuie sur les critères établis par la directive européenne cadre sur l’eau (2000) qui prend notamment en compte des paramètres physico-chimiques, biologiques, hydromorphologiques ou encore quantitatifs. La région se situe donc au-delà de la moyenne française, qui avoisine les 48%. Le même constat s’observe au niveau des nappes phréatiques, qui sont à 87% en bon état dans la région (pour 90% dans l’ensemble du bassin Rhône Méditerranée Corse).
Une meilleure qualité de l’eau … mais une dégradation des milieux aquatiques plus rapide
Un chiffre à mettre en balance avec l’état de sécheresse qui frappe la région depuis le printemps dernier. Car si les pollutions sont moins nombreuses, elles sont concentrées dans une quantité d’eau bien moindre. Comment expliquer ce paradoxe ? « Nous avançons sur un tapis qui recule : nous parvenons de mieux à mieux à limiter les pollutions, mais la situation liée au réchauffement climatique continue de progresser. Il est de plus en plus difficile de limiter la pollution. Mais cela ne veut pas pour autant dire qu’il faut baisser les bras », explique Laurent Roy.
En effet, la Région a été plus durement frappée par les bouleversements climatiques durant la période estivale – sécheresse, inondations, tempête Alex, épisodes cévenols … – ce qui explique l’importante dotation accordée à l’agence de l’eau Rhône Méditerranée, selon Laurent Roy. Ces quarante millions viennent s’ajouter à un budget de 2,6 milliards d’euros mobilisés par l’agence pour la période 2019-2024, qui avait déjà bénéficié d’une rallonge gouvernementale de 22 millions d’euros au printemps dernier. Ils doivent permettre à l’agence de renforcer son action pour la préservation de l’eau, en accompagnant les territoires dans la mise en oeuvre de projets, plus spécifiquement sur trois volets : la sécurisation de l’alimentation en eau potable, bien qu’elle n’ait pas été mise à mal par la sécheresse ; les économies d’eau, y compris dans le domaine agricole ; et enfin la désimperméabilisation des sols.
Il faut créer des “villes-éponges”
Laurent Roy
« Il faut créer des “villes-éponges”, dont les sols permettent d’absorber l’eau de pluie et de limiter les ilots de chaleur », insiste le directeur général de l’Agence de l’eau. Entre 2019 et 2021, l’agence de l’eau a ainsi accompagné la désimperméabilisation de 140 hectares sur le bassin Rhône Méditerranée Corse, soit 34% de son objectif fixé à 400 hectares à l’horizon 2024.
Lutte contre le gaspillage, réutilisation des eaux usées … Christophe Béchu précise la feuille de route gouvernementale
Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires Christophe Béchu, qui accompagnait la Première ministre dans son déplacement à Marseille lundi 14 novembre, précise au micro de Gomet’ les grandes lignes de la feuille de route que le Gouvernement veut mettre en place pour préserver la ressource en eau : « Nous voulons lutter contre le gaspillage : 20% de l’eau potable de ce pays part dans des fuites, voire 50, 70% dans certaines communes. Il y a également un gros enjeu sur la réutilisation des eaux usées. Seulement 1% de nos eaux sont retraitées et réutilisées, quand ce taux atteint les 10% en Italie ou en Espagne. Enfin, il y a la question plus complexe de la diminution des besoins en eau dans l’agriculture, avec des trajectoires à définir en concertation avec les professionnels. » Pour mettre en œuvre ces objectifs, le ministre travaillera en concertation avec les agences de l’eau, qui sont des établissements sous tutelle du ministère de la transition écologique.
Le défi des micropolluants et de la désartificialisation
D’autres défis restent à relever pour améliorer davantage la qualité des eaux, notamment la lutte contre les micropolluants qui, bien qu’ils aient été divisés par six depuis 2015, continuent de proliférer dans l’eau de nos rivières. Substances chimiques, médicaments, nicotine et … même la caféine : autant de matières retrouvées dans l’eau des rivières et dont la moindre micro particule peut dérégler l’état du milieu aquatique, en particulier les PFAS (per et polyfluoroalkylées), aussi appelés « polluants éternels ». « Il est difficile de miser uniquement sur la sensibilisation du grand public, surtout pour l’utilisation de médicaments. Nous préférons la solution d’un meilleur traitement de l’eau pour filtrer plus finement les micropolluants », détaille Laurent Roy.
L’Agence de l’eau accompagne également les industriels afin de réduire leurs rejets de polluants. La tendance est à l’amélioration des habitudes des industriels « Nous avons par exemple accompagné financièrement Alteo Gardanne pour mettre fin aux rejets de boues rouges. A Tarascon, Fibre Excellence a remplacé le papier blanc chloré par du papier écru, et n’utilise donc plus de chlore » illustre le directeur général de l’agence. « Les entreprises ont tout intérêt à anticiper les normes européennes, afin de garder un avantage concurrentiel », ajoute-t-il.
L’Agence de l’eau insiste aussi sur la désartificialisation de la morphologie des rivières. En Provence-Alpes-Côte d’azur, 46% des rivières sont en effet artificialisées : bétonnage, déboisement des rives, endiguement des cours d’eau, ou encore le cloisonnement des rivières, qui empêche la circulation des espèces aquatiques. « Il faut redonner une physionomie naturelle aux rivières » alertent les représentants de l’Agence de l’eau.
La tâche de protéger la ressource en eau n’est donc pas simple face aux défis de la pollution combinée au réchauffement climatique. Lors de la convention des maires de la Région Sud, la Première ministre a érigé la cause de l’eau en l’un des enjeux prioritaires de sa planification écologique.
Document source : le rapport 2022 de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse
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