Pour Aix, dès demain, quelles sont les solutions pour une ville bioclimatique ? Une question de départ, aux milles voies possibles, a été l’objet d’un débat-conférence prospectif co-organisé par la Ville d’Aix-en-Provence, l’Agence d’Urbanisme pays d’Aix-Durance (Aupa) et le média Sans transition!, le 14 novembre dernier au sein de l’auditorium du conservatoire Darius Milhaud de la commune. A cette occasion, plusieurs experts ont pris la parole pour faire part de leur avis dont l’invité d’honneur de la conférence, l’architecte suisse Philippe Rahm.
L’urbanisme de demain avec “l’architecture météorologique”
L’architecture météorologique, un concept assez flou, qualifie le travail de Philippe Rahm : « l’architecture a été pensée pour l’Homme, pour qu’il résiste aux intempéries, au froid comme à la chaleur » introduit ceui qui est aussi designer. « L’architecture est un moyen de créer un micro-climat dans lequel le corps humain peut survivre ».
Le secteur du bâtiment représente 37% des émissions carbone mondiales en 2021. « Le bâtiment est engagé, et il est une conséquence donc de l’architecture » argumente Philippe Rahm, plaçant ainsi l’architecte au cœur de la réflexion et de l’action en faveur d’un monde bioclimatique. « Finalement l’architecture c’est la construction d’atmosphère, un travail sur elle » conclut Philippe Rahm. Le bâtiment, “la forme”, parviendra-t-il à suivre le climat ? Comment construire la ville de demain dans cette logique ?
Pour l’architecte, les solutions pourraient par ailleurs être celles appliquées dans les pays plus chauds qui connaissent des températures que nous pourrions connaître très bientôt, comme en Afrique du Nord, « Il faut regarder vers les solutions d’Afrique du Nord. Le maire de Genève, par exemple, a dit récemment qu’il ne doit plus penser sa ville comme une ville suisse, mais comme une ville des Pouilles, en Italie, car il aura le climat des Pouilles dans 20 ans. Il faut modifier nos modes culturels pour penser la ville de demain » a t-il défendu.
Pour faire face au réchauffement climatique en ville, Philippe Rahm a notamment suggéré la création de flux d’air dans les zones urbaines ainsi que la génération d’espaces ombragés en utilisant des arbres, mais aussi des tentures et la conception de rues couvertes.
Aix, demain : 27 nuits chaudes d’ici 2050…
A quoi s’attendre demain à Aix-en-Provence sur le plan du réchauffement climatique ? Quels sont les grands enjeux ? L’agence d’urbanisme du Pays d’Aix-Durance, l’Aupa a profité de l’événement pour donner aux Aixois quelques chiffres sur leur vie citadine de demain. Selon le Climadiag de Météo France (outil de diagnostic des enjeux climatiques dans les villes), la température estivale moyenne d’aujourd’hui à 22°C avec sept nuits chaudes (+ de 20°C) passera à 24°C avec 27 nuits chaudes d’ici 2050.
Autre donnée, à Aix, les émissions de gaz à effet de serre sont dû à 60% au transport routier, le résidentiel représente quant à lui 13%, selon les dernières données d’AtmoSud. En 2019, seulement 3,9% de la consommation d’énergie dans la Ville d’Aix provenaient d’énergies renouvelables. De plus, un logement aixois sur trois est énergivore. Rappelons qu’en 2025, il sera interdit de mettre en location des logements classés G, puis en 2034 ceux classés E. Un parc potentiel aixois pourrait alors sortir de la location… A Aix, l’Aupa précise que seulement 1% des logements du centre-ville a moins de dix ans (contre 6% dans les autres centres de la métropole). Au niveau de la métropole, 700 immeubles sont vides à + de 70% depuis au moins deux ans, « il y a un potentiel d’intervention publique fort » partage les intervenants de l’agence.
Concernant les périodes de canicule, les endroits les plus sensibles aux fortes chaleurs sont les zones commerciales. Prenant pour référence une journée historiquement chaude, le 29 juin 2019 à 10h, l’Aupa partage les scores : il faisait 33,7C° à Puyricard (quartier au nord d’Aix), 35C° dans le centre ancien de la ville contre 40C° dans la zone d’activité économique des Milles. Pour lutter contre ces fortes chaleurs, la ville d’Aix-en-Provence compte 51% d’espaces de nature dans son tissu urbain, dont 250 km de cours d’eau.
La Ville mise sur la végétalisation
Karima Zerkani-Raynal, adjointe au maire en charge de l’attractivité, au mécénat et aux relations internationales, a mis en avant une série d’initiatives de la mairie lors du débat-conférence. L’engagement d’Aix-en-Provence se traduit par un ensemble de mesures financées à hauteur de 3 millions d’euros par an. Parmi celles-ci, figurent en tête de liste le développement des modes de déplacement écologiques. La ville s’investit ainsi dans la promotion des moyens de transport doux pour réduire l’empreinte carbone, favorisant ainsi l’usage des vélos, des transports en commun et encourageant la marche à pied. La rénovation énergétique des écoles est aussi un de ses axes. Depuis 2021, la Ville s’est engagée dans des travaux visant à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments scolaires. Cette initiative vise à réduire la consommation d’énergie, à diminuer les émissions de gaz à effet de serre et à offrir un environnement sain aux élèves et au personnel éducatif. Par ailleurs, la municipalité met l’accent sur la végétalisation des cours de récréation pour atténuer les effets des vagues de chaleur estivales.
Dans le cadre de ses objectifs à long terme, Aix-en-Provence envisage un plan de massification du photovoltaïque avec comme stratégie de réduire sa facture énergétique et de se rapprocher de l’autonomie énergétique.
Actuellement, seulement 3,5 % de l’énergie consommée à Aix provient de sources renouvelables, mettant en évidence le besoin urgent d’une amélioration dans ce domaine.
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