On parle beaucoup de « nature en ville » mais avec soudain un fétichisme de protection de tout arbre. On a vu à Marseille des manifestants protester contre l’arrachage d’un malheureux pin porte d’Aix ou de quelques arbres de plantation récente à la Plaine. Ce fétichisme soudain de l’arbre par les urbains est-il raisonnable ? Comme envisager un retour du vert, des arbres en ville ?
J. B. : Je me souviens de l’époque, vers 1950, où l’on a abattu les platanes du cours Lieutaud et de la rue de Rome, la partie haute, à Marseille : mon père disait : « On va pouvoir mieux circuler en voiture ». Je me souviens d’une séance de la commission départementale d’urbanisme où le directeur départemental de l’équipement de l’époque*, vers 1970, a fait approuver le changement entre le système – « la rue, les trottoirs plantés et l’immeuble » et le nouveau : « la rue, un espace indéfini, plus ou moins végétalisé, et l’immeuble ».
Je me souviens de la décision de maire* d’Aix qui a refusé d’un revers de bras la création d’un parc central sur les 25 ha de la gare des marchandises en bas du cours Mirabeau. Je me souviens du dessin de la place des Cardeurs, à Aix, où les architectes* voulaient imiter Spolète et les villes d’Ombrie ou de Toscane, radicalement minérales et sans arbres (des arbres auraient empêché que l’on construisît un parc souterrain.).
Repenser la rue, l’avenue, les places et les placettes, revenir à l’ordonnancement urbain
Jean Bonnier
C’est un nouvel urbanisme qu’il faut promouvoir et ne pas s’arrêter à quelques arbres, certes utiles, ici et là. Repenser la rue, l’avenue, les places et les placettes, revenir à l’ordonnancement urbain et abandonner le « parcelle par parcelle » : on est loin de la forêt, là !
Il semble qu’une conception de la nature « décorative » s’impose avec des fleurs renouvelées sur des supports artificiels, avec des plantes à obsolescence programmée, avec des pelouses imposées. Comment un urbain, particulier ou commune peut-il devenir un jardinier durable ?
J. B. : Je pense aux jardins dits « ouvriers » que je préférerais appeler « de voisinage ». Il y en a à Marseille et on pourrait les développer dans toutes les communes ou les quartiers de la métropole, chaque fois que c’est possible : on y cultive de bonnes choses, on y apprend à les cultiver, on se parle, on s’entraide, etc.Cela relève du dess{e}in de la ville.
* Le maire était Alain Joissains, le DDE, directeur départemental de l’équipement, André Ponton et les architectes étaient les anciens élèves de Fernand Pouillon. Est-il nécessaire de les nommer tous ?
(1) A la rencontre des forêts méditerranéennes: Quarante années de témoignage Broché, janvier 2020 de Jean Bonnier 310 pages 35€
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