Les chiffres de l’Insee le montrent : les filles ont de meilleurs résultats scolaires de l’école primaire à l’enseignement supérieur. Pourtant, elles sont moins nombreuses à occuper des postes à responsabilité dans la vie professionnelle.
En cause, ce qu’on appelle les stéréotypes de genre, c’est-à-dire des caractéristiques arbitraires et inconscientes, forgées à partir de présupposés sur les hommes et les femmes.
À l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes lundi 8 mars, Aix Marseille Université, l’université socialement engagée, proposait une conférence en ligne sur le sujet. A cette occasion, Isabelle Régner, médiatrice du débat, vice-présidente d’Aix Marseille Université déléguée à l’égalité femmes – hommes et à la lutte contre les discriminations, et responsable d’équipe cognition et neurosciences sociales, invitait Delphine Martinot, professeure en psychologie sociale à l’Université Clermont-Auvergne rattachée au CNRS. La chercheuse a notamment travaillé sur l’identité de soi, le statut social et l’inégalité de genre. De nombreuses études à l’appui, Delphine Martinot a présenté ses travaux et a pointé les raisons qui expliquent que « les femmes continuent à faire des choix d’orientation moins rentables » en termes de rémunération, responsabilités ou encore de prestige.
L’école une institution féminine ?
Delphine Martinot avance que les stéréotypes de genre et les valeurs véhiculées par l’école engendrent des « futures inégalités de genre professionnelles, de la domination masculine ». Des stéréotypes qui conduisent à une perception différente de la réussite entre les filles et les garçons. Les valeurs dites féminines (le conformisme et l’altruisme par exemple) sont valorisées à l’école, mais dévalorisées dans le monde professionnel et dans la société. L’école serait donc une « institution féminine ».
Un argument sexiste pour la chercheuse, qui conduirait de facto à la « dévalorisation de la supériorité scolaire des filles » réduites à leur supposé conformisme. Et qui, à l’inverse, amènerait à une « légitimation du plus faible investissement des garçons ».
Conformisme versus compétition
Les résultats présentés montrent que les filles réussissent mieux lorsque les attentes requièrent du conformisme, alors que les garçons se démarquent davantage lors de situation où confiance en soi est mise en avant.
Même constat dans les études qui interrogent les filles et les garçons sur les valeurs de réussite personnelles : là où les garçons valorisent la compétition et l’ambition, les filles accordent davantage d’importance à l’altruisme et à la coopération.
Le monde professionnel et, de manière plus générale, la société, jugée patriarcale, valorisent la compétition entre les individus et l’ambition, valeurs que l’on attribue aux garçons. Les valeurs dites féminines sont alors dépréciées lorsqu’on s’éloigne de la sphère de l’éducation scolaire, et donc dans le domaine professionnel.
« Toute formation, profession ou discours avec des valeurs de compétition, ambition est susceptible de désavantager les femmes ».
Delphine Martinot