Le Crédit Agricole Alpes Provence (CAAP) joue la différence et marque fortement son identité de banque mutualiste dans un univers bancaire qui se banalise et se numérise. La conférence de presse annuelle de présentation des résultats 2021, lundi 21 mars dernier, aux Docks de la Joliette à Marseille, a permis aux dirigeants de la banque de rappeler ses fondamentaux. Franck Alexandre, viticulteur, président du conseil d’administration rappelle que « 100 % des décisions d’investissement du Crédit Agricole Alpes Provence sont prises sur le territoire » et que le capital est toujours détenu par des sociétaires, 288 000 à ce jour.
Les résultats de l’année 2021 sont exceptionnellement bons, l’encours de crédit a augmenté de 5,4% et l’encours de collecte lui de 6%. La banque mutualiste revendique une part de marché de 18,6% des crédits, 16,2% de la collecte sur son territoire. Le produit net bancaire, le chiffre d’affaires de la banque, a fortement cru passant de 380 millions d’euros en 2020 à 452 millions en 2021, c’est une progression de 19% ; le résultat brut d’exploitation a progressé de 52%.
Serge Magdeleine, directeur général tempère ce résultat historique expliquant que pour un tiers, il s’agit de bénéfices venant de la holding du groupe (1), pour un tiers de la baisse des risques (divisés par deux) et pour un tiers de l’exploitation « grâce au dynamisme commercial des équipes ». Sagesse de gestion, la banque va garder 84% de ce résultat dans le groupe et donc limiter la distribution des bénéfices, améliorant ainsi son ratio de solvabilité Bâle III qui passe de 19,4% à 21,7%.
Le Crédit Agricole qui reste la banque principale pour 80% des agriculteurs, ne réduira pas son réseau contrairement à d’autres acteurs, et ne fermera pas d’agence. Si deux clients sur trois ne se déplacent plus, l’agence devient en priorité « un lieu de vie collective » et transforme son activité. « Nous avons gagné cinq ans sur la trajectoire digitale », avoue le DG. Le matin, les agents traitent les opérations quotidiennes, l’après-midi est consacré au traitement des projets, aux rendez-vous personnel (300 000 par an), aux activités à distance qui représentent aujourd’hui 40% du chiffre d’affaires. Pour Franck Alexandre, président du conseil d’administration, le maintien des agences, dans le monde rural notamment, est un enjeu sociétal, le Crédit Agricole étant souvent le dernier guichet ouvert. « Nous n’avons pas vocation, confirme le directeur général, à fermer des agences ».
Banque des entreprises
Si le Crédit agricole est bien connu pour son activité en direction des particuliers avec les crédits immobiliers, Serge Magdeleine tient à positionner le Crédit Agricole comme une banque des entreprises avec ses trois outils de fonds propres : Cap Innov’éco qui délivre des prêts d’honneur, soit directement, soit par l’intermédiaire des plates-formes d’initiatives locales, Cap Création qui intervient en premier tour, avec des tickets de 200 000 à 300 000 euros et Sofipaca pour des investissements de trois à cinq millions d’euros. L’activité entreprise représente 50% du chiffre d’affaires de la banque, (200 millions d’euros de PNB). CAAP a délivré 1,6 milliard de crédits aux entreprises (en plus des 626 millions d’euros de PGE) et 400 salariés sont fléchés sur cette activité. À noter de plus que, selon le rapport annuel, 23 967 pauses de mensualités de crédits ont été accordées afin de baisser les charges courantes des entreprises, des professionnels, des agriculteurs et des particuliers.
Quatre entrepreneurs accompagnés
Julie Davico-Pahin, d’Ombrea rappelle que dans sa famille, « tout le monde est agriculteur » et que lors de la création de la société avec son père, le Crédit Agricole a été la première banque à croire au projet des ombrières solaires. La société qui compte aujourd’hui 50 salariés, a démarré avec un prêt d’honneur de Caap Innov’Eco et le Crédit agricole a suivi jusqu’aux levées de fonds récentes : « Les administrateurs du Crédit agricole, dit-elle, des agriculteurs ont été les seuls à nous challenger sur le volet agricole de notre projet ».
Emmanuel Dufour, fondateur du réseau bio Marcel & fils, qui compte 45 magasins et réalise un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros, a rencontré le Crédit agricole lorsqu’en 2012 une banque parisienne a refusé de financer un nouveau magasin (voir l’article de Gomet’). Depuis lors, Sofipaca est aux côtés des boutiques Marcel & fils dans ses levées de fonds en 2015, 2018 et 2020. « Le Crédit Agricole fonctionne en circuit court dit-il, c’est un banquier qui a une autonomie de décision, ses avis ne sont pas ceux d’un comité anonyme, mais d’un partenaire local. »
Amel Khemissi, fondatrice d’Osmosis propose une solution à destination des propriétaires de locaux commerciaux et des investisseurs pour rentabiliser les investissements et garantir un bon taux d’occupation en transformant les locaux inoccupés en meublés de tourisme. En pré-seed (amorçage), elle a obtenu un prêt d’honneur.
Innovation dans l’innovation, le Crédit agricole soutient l’intrapreneuriat de ses cadres. Franck Chemin était responsable sécurité de la banque. Il a constaté, notamment avec la pandémie, que le risque de cyber-attaque s’est généralisé et que le Crédit Agricole pourrait mettre à disposition du public, les solutions qui ont fonctionné dans la maison. Cyberway est née et a perçu 500 000 euros de capital.
« On regarde plus le porteur de projet que le bilan » affirme Serge Magdeleine en conclusion.
Thecamp : solution en vue
Interrogé sur l’investissement du Crédit Agricole dans thecamp et sur le devenir du projet de Frédéric Chevalier, Serge Magdeleine tient à souligner que si l’on peut encore parler de ce projet, c’est parce que l’année dernière le Crédit Agricole a contribué à la restructuration financière. Il apprécie aujourd’hui les deux candidats au rachat du site (lire notre article).
Appel à projets : « L’innovation au service d’une agriculture durable »
Le Crédit Agricole Alpes Provence lance un deuxième appel à projets, « L’innovation au service d’une agriculture durable », à destination des start-up. Après la première édition en 2021 (67 projets candidats/15 finalistes/6 lauréats), le Crédit agricole Alpes Provence renouvelle l’appel à projets lancé par son pôle Capital et innovation. Le thème « L’innovation au service d’une agriculture durable » reprend l’ADN de la banque coopérative. Son objectif est de rendre accessible au plus grand nombre d’exploitations les innovations destinées à accompagner la transition écologique de l’agriculture : limiter l’impact sur les ressources (l’eau, le sol, l’air, l’énergie et même l’humain), optimiser l’usage de la data (captation, analyse, exploitation, traçabilité) et contribuer positivement à son environnement (recyclage, pièges carbone, production d’énergie, etc.).
Modalités :
Qui peut candidater ? Les start-up de moins de cinq ans installées dans le 13, 84 ou 05 (ou qui souhaitent s’y implanter en 2022) et qui développent des solutions innovantes répondant aux enjeux des transitions agricoles.
Les dotations : les trois premiers lauréats recevront des dotations de 25 000 €, 10 000 € et 5 000 €.
Candidature jusqu’au 17 avril minuit
(1) En 2021, la Banque centrale européenne avait suspendu la distribution des bénéfices de Crédit Agricole SA.