Coup de gueule de la mairie de Marseille à deux jours du conseil métropolitain. Les élus de la majorité municipale en ont « ras-le-bol », pour reprendre les mots de Yannick Ohanessian (PS), ce midi au Palais du Pharo. « La situation est inacceptable aujourd’hui à Marseille », tonne l’adjoint à la tranquillité publique face aux journalistes, venus en nombre, tant le dossier est bouillant.
Après huit jours de grève des éboueurs, les intempéries de dimanche et de lundi ont emporté vers la mer des milliers d’ordures (notre article). Environ 3000 tonnes de déchets n’ont d’ailleurs pas encore été ramassées par le personnel métropolitain de la collecte. Canettes, bouteilles en plastique… les plages marseillaises sont dans un état d’insalubrité rarement atteint, et devraient le rester pour un moment. Les renforts de dernières minutes déployés lundi par la Métropole, à peine visibles dans les arrondissements les plus touchés, n’ont rien changé au désastre. Et pour couronner le tout, un violent Mistral devrait souffler sur les tas de détritus dès demain.
Yannick Ohanessian moque les récentes déclarations de Martine Vassal (LR) lors du dernier conseil municipal. « La présidente de la Métropole est venue nous dire vendredi qu’il y avait une fin de conflit [avec les syndicats d’agents de la collecte] », rappelle le socialiste. Mais « la grève n’est pas finie (…) les bennes ne sortent pas », dénonce Christine Juste (EELV), adjointe à la propreté. Les immondices jonchent toujours les trottoirs et les chaussées du centre-ville de Marseille. La pluie, sans surprise, n’a rien arrangé. « Gouverner c’est prévoir », conclut Yannick Ohanessian. La Métropole avait pourtant ouvert lundi une cellule de crise pour anticiper les dégâts liés aux nombreuses averses. Sans doute trop tard.
Nous avons gagné la ville, mais nous sommes dépossédés des compétences primordiales
Christine Juste
Pour Christine Juste, c’en est trop. « La deuxième ville de France doit récupérer la gestion quotidienne de la voirie, des déchets et de la propreté », déclare-t-elle. Il en va, selon l’adjointe, de l’image de Marseille. « Il est grand temps que nous reprenions la gestion de notre ville », insiste Christine Juste. À quelques jours du retour d’Emmanuel Macron, les élus municipaux attendent une accélération sur le dossier de la réforme métropolitaine. « Nous demandons au Président de la République (…) que la ville de Marseille récupère les compétences du quotidien », annonce Christine Juste. Le chef de l’État sera à Marseille le 16 octobre.
Le verdict de la chambre régional des comptes concernant la gestion des ordures est sans appel. « Aucune évolution majeure n’a été réalisée dans la collecte des déchets depuis la création de la Métropole (ndlr : en 2016) », peut-on lire dans le rapport de la CRC qui sera rendu publique ce jeudi. Cette compétence représente pourtant le deuxième budget de la Métropole, derrière le transport. Le coût par habitant de la collecte des déchets dans la Métropole d’Aix-Marseille est 47.5% supérieur à la moyenne nationale.
Mise à part quelques courageux bénévoles, les Marseillais constatent impuissants ce mardi une catastrophe écologique. « C’est un écocide », signale Hervé Menchon (EELV). L’adjoint au maire de Marseille en charge de la mer dénonce « un coup de poignard à la Méditerranée, à une biodiversité qui est en berne ». L’élu écologiste rappelle que les déchets sur les plages ne disparaîtront pas du jour au lendemain, et que la pollution de ces dernières 48 heures persistera pendant un long moment. « Martine Vassal porte une grave responsabilité dans le désastre environnemental qui a commencé hier », termine Hervé Menchon.
Pas de temps à perdre pour des polémiques stériles. Depuis 48h, les agents d’@AMPMetropole sont au travail sans relâche.
— Martine VASSAL (@MartineVassal) October 5, 2021
Les plages ont été nettoyées, il reste beaucoup à faire mais ils ont prouvé leur professionnalisme et je les en remercie. pic.twitter.com/smTgVPoOJ2
Un conseil du territoire Marseille Provence sous tensions
Élus de droite et de gauche se sont retrouvés à l’occasion du conseil du territoire de Marseille Provence cet après-midi. Dès le coup d’envoi de la séance, Sophie Camard (ex-LFI) demande à prendre la parole. « Nous vivons une catastrophe écologique, lance la maire des 1er-7e arrondissements. En plein débat sur la réforme de la Métropole, elle affirme que « Marseille veut reprendre sa souveraineté sur les compétences de proximité », notamment la collecte des déchets et le transport. Sophie Camard conclut sa tirade en indiquant que la mairie est « volontaire pour reprendre les clés ». Le président du conseil Roland Giberti (LR) lui répond dans la foulée : « prenez-les madame, mais faites le d’une manière démocratique, ça vous changera un peu ». Les réactions sont partagées dans l’hémicycle, entre huées de la gauche, et applaudissements de la droite.
Dans une atmosphère électrique, Roland Mouren (LR), vice-président métropolitain à la propreté, répond à Sophie Camard. « C’est comme cela depuis 1920, affirme-t-il, vous nous reprochez le nombre de déchets dans les rues de Marseille, je vous garantis que ce n’est pas moi qui les produis ». Sans convaincre les élus de la majorité marseillaise, Roland Mouren poursuit son explication et met en cause… la pluie : « désolé, mais la pluie n’a pas arrangé les choses, c’est certain ». Celui qui est aussi maire de Châteauneuf-les-Martigues espérait vendredi un retour à la normale dans les rues de Marseille en milieu de semaine. Roland Mouren est aujourd’hui pessimiste quant à l’aboutissement de cet objectif. Chaque jour, les Marseillais produisent 1200 tonnes de déchets.
Selon nos dernières informations, une altercation verbale a eu lieu en sortie de conseil entre le conseiller de la majorité métropolitaine Jean-Baptiste Rivoallan (LR) et plusieurs élus de la majorité municipale marseillaise.
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