Ficorec travaille aussi bien sur des dossiers nationaux que régionaux. Comment s’en sort la métropole Aix-Marseille comparé au reste du pays ?
M.C : Nous sommes plutôt bien placés. On a réalisé une bonne année malgré les conditions particulières de la pandémie. La complexité de notre région réside dans le manque de solution pour le financement des opérations supérieures à un million d’euros. On a du mal à aller chercher davantage qui nous permettrait de passer des start-up aux scale-up, d’un acteur local à national voire international. Malheureusement, les entreprises vont rapidement aller chercher des fonds sur Paris ou Lyon. C’est un peu dommage car les acteurs sont là. Par exemple, Region Sud iNvestissement est capable de mettre deux millions sur la table, Bpifrance peut aussi intervenir sur ces montants, et avec un ou plusieurs partenaires bancaires, les cinq ou six millions d’euros sont atteignables.
Qu’est-ce-qui explique ce blocage ?
M.C : Le tissu entrepreneurial marseillais est beaucoup dans l’innovation, dans la création de start-up. Il faut parvenir à faire passer les projets au stade supérieur pour avoir davantage d’ETI. Cela va arriver, je n’en doute pas. Ce sera seulement un peu plus long car la région est moins mature que Paris. Nous ne sommes pas les seuls. Le constat est le même pour Nice, Bordeaux, Lille… La finance est encore un peu trop concentrée à Paris. La typologie des sociétés locales explique également ce phénomène. Dans le baromètre, les biotech sont très présentes mais cela manque par exemple de deep tech qui lèvent des fonds à tour de bras en ce moment à Paris et ailleurs. L’économie sociale et solidaire est aussi très présente localement et ce sont des marchés qui lèvent moins.
Est-ce qu’il n’y a pas aussi encore trop de freins chez les dirigeants locaux pour se lancer dans de plus grosses opérations ?
M.C : Un peu. Notre cabinet travaille notamment beaucoup avec les accélérateurs locaux et nous essayons d’expliquer l’intérêt d’une levée de fonds. Les jeunes patrons ont parfois un peu trop peur d’être dilués. Il ne faut pas être naïfs. Il y a des investisseurs qui tentent de profiter de la crise pour racheter des entreprises pour pas cher. Pour autant, c’est loin d’être la majorité. Le message que nous voulons faire passer est le suivant. Il vaut mieux avoir 80% d’une boîte qui vaut un million d’euros que 100% d’une société qui ne décolle pas au-delà de 100 000 euros de chiffre d’affaires. Nos dirigeants doivent avoir la capacité d’agir. Ils ne peuvent plus se contenter d’une bourse french tech, de petits business angels et d’un prêt à taux zéro. Il faut toujours être en croissance car le chiffre amène du chiffre, le chiffre amène de la levée de fonds et à partir de là, le projet rentre dans une autre dynamique beaucoup plus intéressante.
Combien de levée de fonds Ficorec suit chaque année ?
M.C : Il faut différencier les projets portés par nos clients où nous sommes juste expert-comptables et les dossiers que nous accompagnons de A à Z. Dans le premier cas, le cabinet enregistre environ 40 opérations par an. Dans le deuxième cas, nous sommes partenaires très actifs sur environ une quinzaine de levées de fonds. Mais ce début d’année est très actif avec déjà 45 opérations depuis janvier. Ce chiffre s’explique aussi par la croissance du cabinet. Une nouvelle antenne a été ouverte par exemple à Aubagne et capte de nouveaux dossiers.
Pour conclure, comment voyez-vous l’évolution des investissements dans les prochains mois ?
M.C : Il y a une dichotomie sur le marché en ce moment. Certains fonds comme Tertium et Connect Pro ont réussi à boucler leur troisième levée. Il y a un véritable enthousiasme, une envie de participer à la relance de la croissance. Et dans le même temps, la plus grande prudence est toujours de mise. L’argent est là mais heureusement, il ne coule pas totalement à flot. Il ne faut pas dire aux entreprises que c’est gratuit. Les investisseurs regardent plus attentivement les projets avant de valider leurs participations. Et c’est très bien. Il faut que les projets soient à la hauteur de l’enthousiasme que l’on ressent pour réussir la relance.
Baromètre des levées de fonds 2020. Notre série :
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Baromètre des levées de fonds 2020 : l’investissement résiste à l’épidémie (1/4)
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