Bien qu’elle ne recouvre qu’un pour cent de la surface marine terrestre, la Méditerranée abrite 18% des espèces aquatiques de la planète. Aujourd’hui, la Grande Bleue est confrontée à des changements climatiques et environnementaux sans précédent. « Non, notre bassin méditerranéen ne va pas bien », observe Lina Tode, directrice adjointe de Plan Bleu¹, à l’occasion d’une conférence organisée mercredi 8 septembre 2021 au Congrès mondial de la nature à Marseille. Le centre d’expertise piloté par l’Onu (Organisation des nations unies) s’appuie sur le rapport RED 2020 (rapport sur l’état de l’environnement et du développement), une étude commandée par les 21 pays riverains de la Méditerranée, pour alerter les décideurs politiques. « Nous ne sommes pas en bonne voie pour atteindre les objectifs de développement durable fixés par les grandes instances à l’horizon 2030, je dirais même qu’ils sont irréalisables », regrette Guillaume Sainteny, marin et président de Plan Bleu depuis le début de l’été.
- Plan Bleu est le centre d’activités régional du plan d’action pour la Méditerranée piloté par l’Onu . Autrefois une association, ce pôle d’expertise et de développement basé à Marseille a été créé en 1977 par l’écologiste français Serge Antoine. Plan Bleu a pour mission de protéger le bassin méditerranéen contre les fortes pressions qui l’affaiblissent. La structure effectue des études thématiques et propose des solutions pour inventer une Méditerranée plus durable. Ce centre constitue une interface stratégique entre les scientifiques, les décideurs politiques et les leaders d’opinion.
Pourtant des chemins de transition vers une Méditerranée plus durable existent. « Nous avons besoin de changements en profondeur, car ce sont nos pratiques qui nuisent le plus à la santé du bassin méditerranéen », estime Lina Tode. L’experte socio-économique rappelle que l’activité humaine – pêche, tourisme, transport – des 512 millions de Méditerranéens (dont un tiers vit sur la côte) représente la pression la plus forte sur la biodiversité de la Grande Bleue. Le dernier rapport de la Tour du Vallat fait d’ailleurs état d’une baisse de 20% de vertébrés en Méditerranée en l’espace de 23 ans (lire notre article). Selon Lina Tode, il est primordial de favoriser la coopération régionale. Plan Bleu suggère notamment de développer l’aquaculture, les transports maritimes et de restaurer les zones humides (marécages) en Europe.
Méditerranée : le niveau de l’eau pourrait augmenter de 90 centimètres d’ici la fin du siècle
Le président de la République Emmanuel Macron, en visite à Marseille la semaine dernière, a notamment annoncé que 5% des aires marines françaises en Méditerranée seraient protégées d’ici 2027 (contre 0.2% aujourd’hui). « C’est très bien, se réjouit Guillaume Sainteny, mais cela veut aussi dire que 95% de ces aires ne le seront pas ». Après 1989, 2005 et 2020, le centre d’expertise Plan Bleu prévoit la publication d’une nouvelle étude en 2023. Un document qui devrait établir de nouveaux objectifs pour les États riverains de la Méditerranée. D’après Katarzyna Marini, docteur en sciences de l’environnement et représentante du MedECC (réseau de 700 experts méditerranéens sur le changement climatique et environnemental), il est urgent de réagir. Si la situation ne s’améliore pas dans les prochaines années, les canicules vont se multiplier, les maladies vectorielles circuleront davantage et le niveau de l’eau pourrait augmenter de 90 centimètres d’ici la fin du siècle.
Document source : les dix infographies de Plan Bleu
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