C’est un vent de contestation né en 2017 qui ne faiblit pas. Quatre ans après, les associations, qui se sont réunies mercredi 15 décembre, se battent toujours pour la réhabilitation des vestiges de la carrière antique découverts boulevard de la Corderie au cours de travaux pour construire l’actuelle copropriété qui aujourd’hui les recouvre en partie.
En effet, sur 2300 m² de vestiges, ce sont seulement 635m² qui ont finalement été conservés. Or, le ministère de la Culture vient de prendre la décision de les recouvrir intégralement afin de « les protéger pour les générations futures ». « Cela n’a aucun sens : la pierre, qui prend déjà l’eau, risque de s’éroder encore plus si elle est recouverte de terre ! A terme, les vestiges pourraient disparaître complètement », s’exaspère Michel Villeneuve, géologue et militant pour la protection du site.
La Ville de Marseille s’est elle aussi publiquement exprimée contre l’enfouissement du site par le biais d’un communiqué de presse. Une réaction insuffisante pour les associations : « nous demandons à ce que le maire, Benoît Payan, exprime directement son refus par courrier adressé à l’Etat ». Cet après-midi là, l’édile ainsi que l’adjoint à la culture Jean-Marc Coppola et la maire du 1/7 Sophie Camard étaient conviés à la mobilisation. Aucun n’est venu. Une absence incomprise par les militants qui assurent qu’ « avant d’être maire, Benoît Payan était toujours présent lors des mobilisations pour défendre la carrière ».
Seule Clémence Parodi, conseillère municipale Rassemblement national, a fait le déplacement pour diffuser la question écrite transmise par Stéphane Ravier à Roselyne Bachelot. Le sénateur et conseiller municipal d’opposition y interpelle la ministre de la Culture pour demander « un renforcement le rempart qui surplombe la carrière et envisager sa conservation dans l’intérêt du patrimoine marseillais ».
Les associations demandent une valorisation in situ
A ce jour, ce qui reste de l’ancienne carrière est toujours recouvert par des tissus géotextiles et envahi par la végétation. Cachée derrière l’immense barre d’immeuble ultra-moderne, elle est accessible seulement par le jardin d’enfant qui fait l’angle à Saint-Victor. Seul un panneau format A4, planté derrière une grille, laisse deviner qu’il s’agit d’un site historique. Une bien maigre reconnaissance pour ce qui constitue « l’acte de naissance de Marseille » : « Il y a 2600 ans, les Grecs y ont extrait les pierres qui ont servi à la fondation de Marseille ! », s’insurge Sandrine Rolengo, déléguée de l’association Sites et monuments, à l’origine de la mobilisation. .
« Cette carrière, c’est l’acte de naissance de Marseille ! »
Sandrine Rolengo, déléguée Sites et monuments
Invité sur le plateau de BFMTV il y a deux jours, l’adjoint à la culture Jean-Marc Coppola a pourtant exprimé la volonté de la mairie d’entrer en dialogue avec l’Etat pour réfléchir à une valorisation sur place des vestiges. « Ce que la Ville entend par valorisation, c’est se contenter de trois panneaux explicatifs à côté des vestiges et une restitution 3D. Cela n’est pas suffisant. », estime Sandrine Rolengo.
Les associations réclament des mesures supplémentaires pour la conservation du site, à savoir la mise en place d’un toit pour protéger les vestiges, des jours de visites pour que les Marseillais puissent venir voir et surtout, que le puits grec, qui est susceptible de receler des objets archéologiques, soit fouillé ! » Seule amélioration actée pour l’heure, la mise en place de drains pour permettre à l’eau de s’écouler. En 2018, l’ancienne municipalité avait voté un budget d’un million d’euros pour la revalorisation du site. Les réparations demandées par l’association Sites et monuments pour une protection a minima s’élèverait, selon elle, à 760 000 euros. Les associations présentes réclament d’être intégrées aux éventuelles discussions qui auront lieu, si la Ville parvient à convaincre l’Etat. Le site antique de la Corderie n’a pas fini de déchaîner les passions.
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