Deux ans après son ouverture, le Musée subaquatique de Marseille a complété sa collection. À 100 mètres de la plage des Catalans et à cinq mètres de profondeur, se trouvent désormais 10 statues de 2,5 mètres de haut. Le 5 septembre le fondateur Antony Lacanaud a invité les partenaires et parrains du musée, des médias et des acteurs locaux à l’anse du Pharo pour participer à la cérémonie de l’immersion du « voyageur », la dixième et dernière sculpture pour ce projet.
« Marseille c’est ma ville d’adoption » dit le créateur Bruno Catalano, d’origine franco-italienne né au Maroc en 1960. « Je suis arrivé à Marseille avec des valises, le voyage fait partie de ma sculpture ». En 1995 il commence une série de sculptures « voyageurs » célèbres dans le monde entier et représentées par les galeries à Paris, New York, Singapour, Cannes et Saint-Paul de Vence.
Mais l’intégration de la statue (exposée pour la première fois dans la cité phocéenne sur la place Bargemon en 2013) dans le Musée Subaquatique était un défi : la structure particulière des œuvres de Catalano résiste à une exposition sur la terre ferme, mais elle est trop fragile pour les fonds marins. L’équipe du musée a dû trouver une solution pour stabiliser l’oeuvre originale sans trop l’altérer, afin de créer le jumeau sous-marin du voyageur en ciment naturel fabriqué spécialement pour la galerie sous-marine.
Quelle est la valeur écologique du récif artificiel ?
Ce ciment naturel, la surface rugueuse et les cavités dans les statues permettent aux algues de se développer et à d’autres micro-organismes de s’y installer, faisant du béton un nouveau biotope attractif qui attire d’autres espèces marines. La question de la valeur écologique de cette galerie sous-marine est néanmoins régulièrement posée.
Parmi les invités, certains souhaitent y répondre. Christophe Madrolle, élu (divers centre) de la Région et Isabelle Gerente, fondatrice de Green City Organisation ont exprimé non seulement leur soutien au musée, mais aussi sa pertinence. Ainsi Vincent Salbert, responsable de la direction maritime chez Otéis, groupe français indépendant de conseil et ingénierie écologique, prend la parole. Le Musée Subaquatique de Marseille collabore avec le bureau d’études Otéis et une équipe de biologistes marins pour suivre l’évolution sous-marine et collecter des données scientifiques sur la biosphère du littoral méditerranéen.
Je veux insister sur la prise en compte de l’environnement du musée puisque dès le début on nous demande d’être irréprochable d’un point de vue environnemental. Surtout ce qu’il faut bien voir c’est qu’il s’agit d’un espace assez pauvre en biologie, en espèces vivantes. Et la mise en place de ces sculptures a ramené de la vie, même plus de vie qu’on pensait. Donc outre l’aspect socio-économique, touristique et pédagogique, la valeur écologique est indéniable.
Vincent Salbert
Les résultats montrent, entre autres, une croissance stable et une densité saine de posidonies depuis l’installation du musée en 2020 ainsi qu’une présence accrue de crénilabres et de sars, d’éponges et de crustacés. (Voir l’intégralité de compte-rendu du suivi environnemental de 2021 en document source.
Le cri d’alarme de Morgan Bourc’his
Malgré ce renouveau de la vie marine au large de la plage des Catalans, l’apnéiste et parrain du musée Morgan Bourc’his profite de l’occasion pour faire un point sur la situation écologique actuelle, tant sur que sous l’eau : « Ce musée participe à la sensibilisation envers les menaces qui pèsent sur la mer, mais la problématique est systémique. Le doute n’est plus possible. Alors mon discours d’accueil sur cette dixième statue il est bien noir, mais il faut vraiment qu’on se réveille. […] Vous voyez comment se portent nos forêts calcinées ? C’est la même chose sous l’eau en ce moment ».
« De 0 à 30 mètres c’est la mort qui règne » et « ce voyageur je le perçois comme un exilé climatique » dit @morganbourchis, champion d’apnée et parrain du musée subaquatique de Marseille lors de l’immersion du « voyageur ». Voici son discours inspirant et alarmant ! 🚨 pic.twitter.com/D84CWt34ie
— Gomet’ (@Gometmedia) September 5, 2022
À propos du musée subaquatique de Marseille
Les 10 œuvres exposées à ce jour constituent un récif artificiel artistique destiné à être colonisé par la faune et la flore du littoral sous-marin de Marseille. Le Musée Subaquatique de Marseille ouvert depuis novembre 2020 fait partie du patrimoine maritime du littoral marseillais. Le 8 juin 2021, Anthony Lacanaud a rendu hommage à Albert Falco, un célèbre plongeur décédé en 2012 connu pour avoir été l’adjoint du commandant Cousteau, en donnant son nom à la galerie. Le musée, financé grâce aux dons et au soutien d’acteurs locaux tels que la Ville de Marseille est accessible gratuitement aux nageurs. Plus d’informations sur le site du musée.
Projet du futur : bientôt un musée subaquatique à Toulon ?
Mais ce n’est pas parce que la collection est désormais complète que le musée cesse ses activités. Parmi les statues déjà immergées, il y en a une qui doit remplir une mission particulière. La neuvième sculpture,« Résilience », créée par le sculpteur marseillais Thierry Trivès, est un défi technologique. Elle est équipée d’une caméra HD et de capteurs permettant de mesurer la qualité de l’eau. « Résilience » devrait collecter et partager des données scientifiques de terrain précieuses, telles que des mesures de salinité, l’acidité, la température ou encore des indices de pollution de l’eau via un modem 4G sur une application mobile dédiée, « Gardiens des Océans ».
Actuellement, la sculpture connectée ne permet pas encore un usage autonome mais Antony Lacanaud l’espère le plus rapidement possible. Et ce n’est pas le seul projet prometteur. « On a des partenaires qui sont en train d’arriver pour m’aider à dupliquer le musée puisqu’on a un projet sur Toulon », annonce-t-il.
Document source : Compte-rendu du suivi environnemental de 2021
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