Une stratégie d’endettement propre aux Bouches-du-Rhône
Cette augmentation continue de la dette est à contre-courant de la tendance nationale. Selon le dernier rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion locale, le recours à l’emprunt dans les départements français est en baisse d’environ 7% entre 2016 et 2019 quand la dette des Bouches-du-Rhône augmente de près de 60%. Pour être précis, il faut comparer sa situation avec les collectivités de même taille. Et là encore, il arrive en haut du tableau des départements les plus endettés du pays (cf. graphique ci-dessous). La Métropole de Lyon, qui a fusionné avec le Département du Rhône en 2018, affiche la plus grosse dette par habitant avec 1475 euros mais son contexte particulier trouble un peu la comparaison. Un seul autre département fait pire, la Seine Saint-Denis réputé comme l’un des plus pauvres de France dépasse les 1000 euros de dette par habitant tandis que les Bouches-du-Rhône arrive en troisième position avec 850 euros de dette par habitant quand la moyenne nationale est bien inférieure à 541 euros par habitant.
Une épargne quasiment réduite à néant
Selon le vice-président aux finances, l’état mondial des marchés financiers permet de se financer par l’emprunt sans risques majeurs. « Nous sommes sur des taux extrêmement faibles avec une moyenne à 1% d’intérêts, ce qui est nettement mieux que la plupart des départements de France », assure-t-il. Cette confiance sans faille n’est pas partagée par Celine du Boys, enseignante-chercheuse à l’institut de management public et de gouvernance territoriale d’Aix-en-Provence. Pour la spécialiste des finances publiques, le risque est bien réel : « A long terme, il y aura fatalement une hausse des taux d’intérêt, il faut donc rester extrêmement prudent », prévient-elle. Ce risque de la hausse des taux concerne essentiellement les nouveaux emprunts contractés par le Département car actuellement la collectivité est essentiellement positionnée sur des crédits à taux fixe. Environ un quart de ses emprunts seulement sont dépendants de taux variables. Cette hausse des taux ferait augmenter le coût de la dette qui pèse déjà lourd sur les finances du Département. Il suffit de regarder la dégradation progressive de l’épargne depuis 2015.
Chaque année, le Département dégage un excédent entre ses dépenses de fonctionnement et ses recettes. En résulte, de l’épargne brute. Cette dernière est restée relativement stable entre 2015 et 2019 passant de 209 millions d’euros à 197,5 millions d’euros. Mais il faut soustraire à cette somme le remboursement de la dette pour obtenir l’épargne nette qui constitue le bas de laine du Département pour investir. En 2020, la collectivité a remboursé un peu plus de 70 millions d’euros réduisant son épargne nette à seulement 8 millions d’euros et sur 2021, le budget primitif table sur une épargne quasiment nulle (28 000 euros) avec un remboursement prévu de 98 millions d’euros qui grèverait l’ensemble de l’épargne brute et ainsi ses capacités d’autofinancement l’obligeant à recourir toujours plus à l’emprunt si il veut continuer d’investir dans les projets du territoire. Un cercle vicieux…