La cité phocéenne accueille jusqu’à jeudi 11 juillet à l’Hôtel Dieu Intercontinental le Subsea World, événement international consacré aux déploiement des câbles numériques sous-marins. Si l’organisateur, le média spécialisé Capacity Média, a choisi Marseille, ce n’est pas un hasard : la ville se classe 7e au classement des hubs numériques mondiaux, en termes de taille, selon le classement 2022 du cabinet spécialisé dans les télécommunications Telegeography. Les projets de centres de données (data centers) s’y déploient de plus en plus – Digital Realty, Nautilus – de même que la connexion de câbles numériques : 2Africa, plus récemment Sea-Me-We 6 installé par Orange Marine, ou encore deux câbles de Médusa (d’ici 2025, voir ci-dessous). Durant ces deux jours, les professionnels du secteur venus des quatre coins du monde (Chine, Etats-Unis, Egypte, Moyen-Orient, Espagne, Italie …) se réunissent pour discuter des enjeux du secteur.
Mercredi 10 juillet au matin, en guise d’ouverture du forum, plusieurs sujets hautement stratégiques étaient mis sur la table : comment le secteur s’adapte-t-il au déploiement de l’intelligence artificielle ? Comment s’adapter face à la situation politique tendue au Moyen-Orient, qui rend difficiles – voire impossibles – les liaisons par la Mer Rouge ?
Le business model en mutation des câbles numériques
La table-ronde d’introduction était dédiée aux mutations du secteur. Parmi elles, le perfectionnement de l’intelligence artificielle. « L’intelligence artificielle génère deux types d’enjeux : d’abord, il faut gérer un afflux supplémentaire de données, donc créer des câbles avec plus de fibres à l’intérieur. Ensuite, la question se pose de l’intégration de l’intelligence artificielle dans l’industrie du câble pour optimiser certaines tâches », expose Paul Gabla, vice-président des vente au sein d’Alcatel Submarine Network (qui collabore notamment avec Médusa pour l’implantation de deux câbles à Marseille).
D’autant que l’intelligence artificielle comme la sensing technology (technologie de détection) pourraient élargir, à terme, le champ d’activité des câbles sous-marins, au delà du transit de données. « Il est possible de poser des capteurs sur les câbles pour divers objectifs : ce peut être par mesure de sécurité, pour assurer une maintenance prédictive, mais on peut aussi l’imaginer pour prévenir les tremblements de terre ou les tsunamis », analyse Younès Stouky, d’Orange Wholesale. Des nouveaux usages « qu’il faudra monétiser s’ils s’avèrent fiables et utiles », ajoute à ses côtés Giuseppe Valentino, vice-président au sein de l’entreprise italienne Sparkle. Les acteurs de la filière comptent en tout cas sur l’appui financier des acteurs publics, l’Union européenne comme les régions, pour résoudre ces enjeux, dans un but de souveraineté numérique.
Bientôt deux câbles Médusa atterrés à la plage de la Vieille Chapelle à Marseille
Pour aborder la thématique sous un angle plus local, c’est ensuite le responsable des opérations de l’entreprise catalane Médusa, Damien Bertrand, qui était invité à s’exprimer, notamment pour faire un point d’étape sur les projets à Marseille. Filiale de l’entreprise Afrix Télécom, Médusa travaille depuis deux ans sur un projet de liaison des principaux pays en Méditerranée (carte ci-dessous). Une nouvelle étape a été franchie en avril dernier, avec la fin des travaux sur la plage de la Vieille-Chapelle (8e) pour le forage horizontal et la pose de l’infrastructure qui accueillera deux nouveaux câbles à Marseille, à l’horizon 2025.
Le projet, qui quadrille toute la Méditerranée, se chiffre à plus de 300 millions d’euros, dont 40 millions de la Banque européenne investissement et de la Commission européenne, spécifiquement fléché vers la liaison des universités Nord africaine au réseau Internet. Pourquoi Marseille ? « C’est le hub numérique n°1 en Méditerranée. Nous faisons arriver deux câbles, de 24 fibres chacun, afin d’y concentrer les données provenant à la fois de l’Est et de l’Ouest », explique à Gomet’ Damien Bertrand. Rendez-vous en 2025 pour la mise en service.
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