Les posidonies, ces algues qui entourent les côtes du Parc national des Calanques sont en danger. Détruites par la pollution et les plaisanciers qui mouillent à proximité, elles sont pourtant des trésors pour lutter contre la crise climatique. Car les 200 000 hectares que recouvrent les herbiers dans le Parc national des Calanques pourraient capter environ 1500 tonnes de carbone. C’est 3 à 5 fois plus qu’une forêt tropicale, et 7 à 10 fois plus qu’une forêt tempérée comme celles que nous avons en France. Un bénéfice énorme pour la fixation du carbone, mais aussi un pouvoir de dépollution, mis à mal par la pression touristique.
Le projet « Prométhée-Med »
Pour préserver les posidonies, le Parc national des calanques et EcoAct (société basée à Paris du groupe informatique Atos, experte sur les problématiques liées au climat et aux émissions de gaz à effet de serre), accompagnés le poids-lourd des data-centers à Marseille Interxion et le groupe Schneider Electric France mettent en place un projet pilote : « Prométhée-Med ». Un nom qui rappelle le mythe du titan grec Prométhée, dit “le prévoyant”, qui avait à cœur de donner les armes aux humains pour survivre (en l’occurrence dans le mythe : le feu, volé aux Dieux).
Prométhée-Med propose de construire une méthodologie pour un programme de certification duplicable sur d’autres lieux. En Méditerranée, les herbiers marins couvrent 3,5 millions d’hectares : une telle certification pourrait donc avoir un rôle crucial pour la biodiversité locale.
Le programme est développé dans le cadre du Label bas-carbone qui certifie, depuis 2019, « les projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de séquestration carbone » indique le site du ministère de la Transition écologique. Dans ce cadre, il sera soumis à validation de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) qui appartient au ministère.
Financement via la compensation carbone
Le label permettra de couvrir certains frais, mais le gros du financement du projet pilote sera porté par un programme de compensation carbone.
La compensation, c’est le fait de pouvoir rembourser une dette écologique (d’une entreprise, d’une association, d’un particulier…) générée par des émissions de gaz à effet de serre : ce que j’émets d’un côté, je le récupère de l’autre. Le plus souvent, c’est le fait de planter des arbres. Ici, le programme, mis en place par Interxion et Schneider Electric France, propose aux entreprises qui souhaitent compenser localement de financer la protection des herbiers.
En tout, deux à trois millions d’euros devraient être investis dans l’ensemble de la démarche : la méthodologie pour la certification, mais aussi l’applicatif : positionnement de bouées écologiques (qui n’abîment pas les herbiers marins), et mise en place d’une interdiction de mouillage à proximité des zones à protéger.
Par la suite, le programme de compensation devrait permettre de couvrir les frais de maintenance dans le temps, pour un coût de fonctionnement de l’ordre de 200 à 500 000€ par an.
Un an de travail
C’est donc EcoAct qui va, concrètement, établir la méthodologie. Première étape, actuellement en cours : réunir la documentation scientifique et technique pour appréhender au mieux « la dynamique carbone des herbiers de Posidonie ainsi que des différentes mesures de conservation et de régénération existantes » indique l’entreprise spécialiste de l’impact climatique dans un communiqué.
À la suite de quoi le travail de terrain commencera : mise en place d’une cartographie des herbiers, prélèvement des données, analyse des résultats et création d’un outil de calcul carbone, pour pouvoir proposer le programme de compensation carbone aux entreprises. Le programme sera testé avec le Parc national des calanques en vue d’être repris par la suite, il devra être duplicable. EcoAct devra donc écrire la méthodologie de la démarche, qui sera ensuite validée puis certifiée dans le cadre du label bas-carbone. Enfin, les résultats, appliqués au parc des calanques, seront diffusés début 2022.
Liens utiles :
> Calanques : « Le public est plus sensible à la biodiversité » (Didier Réault)
> Parc des calanques : l’état zéro du milieu sous-marin saisi par Nicolas Floc’h
> Fabrice Coquio (Interxion) : « Nous sommes une valeur refuge »