À la fin des dépouillements, Emmanuel Macron sort majoritaire dans le département des Bouches-du-Rhône avec 52,08% contre 47,92% pour Marine Le Pen. Un résultat majoritaire de 5 points alors que l’écart national est de 17 points. Le vote de ce dimanche 24 avril confirme la cartographie étrange des Bouches-du-Rhône.
Dans quasiment toutes les villes et communes, lorsque Marine Le Pen est arrivée en tête au premier tour, elle sort majoritaire au second tour. Une mécanique qui n’a rien d’arithmétique puisque sa réserve de voix chez Éric Zemmour était limitée autour de 10 %. Constat implacable : le plafond de verre n’existe plus localement et la candidate du Rassemblement national autour d’un socle d’électeurs fidèles a généré une dynamique qui fait éclater toutes les frontières.
La carte très hétérogène des villes RN
La carte des villes, où le Rassemblement national est devenu majoritaire, est totalement hétérogène. Depuis longtemps les villes du tour de l’étang de Berre, affichent un score d’extrême droite important. C’est un univers industriel avec une population ouvrière nombreuse qui a nationalement voté Le Pen. Mais que dire du nord-ouest du département, ou des Saintes-Maries-de-la-Mer, des espaces touristiques ou agricoles qui connaissent moins de difficultés que d’autres communes ? Le vague Rassemblement national y emporte tout, quelle que soit la couleur du maire de la commune : Saint-Étienne du Grès a un maire, Jean Mangion, encarté chez Les Républicains, alors qu’Hervé Cherubini maire de Saint-Rémy-de-Provence est un ancien socialiste. À l’est du département, La Ciotat, Gardanne, Meyreuil, Trets votent Le Pen.
Le bassin aixois reste, comme nous l’avions écrit, très favorable à Emmanuel Macron que ce soit dans la ville centre, Aix-en-Provence qui lui donne 67% des voix. Il y devance Le Pen de 35% des voix. Tout le pays d’Aix, Velaux, Ventabren, Eguilles, La Roque, Venelles… et les communes de la Sainte-Victoire ont été favorables comme au premier tour au candidat de la République en marche.
À Marseille le front républicain a tenu
Après la vague Mélenchon du premier tour à Marseille, où le leader de la France insoumise avait obtenu 31% des voix, et des scores dépassant la majorité absolue dans trois arrondissements, la question se posait du report de voix orphelines de leur leader.
23 345 Marseillaises et Marseillais ont refusé cette option et se sont déplacés dimanche dans un bureau de vote, sont entrés dans l’isoloir pour déposer un bulletin nul ou blanc. C’est 7% des inscrits, sensiblement au même niveau qu’au plan national, mais c’est à peu près le nombre de votants d’une ville comme Martigues.
La carte politique de Marseille telle que nous l’avions analysée au lendemain du premier tour se confirme avec une implantation très forte du Rassemblement national à l’est de Marseille, dans les 10e et 11e (voir l’article de Rémi Logier). Et dans nombre de bureaux de vote du 13e.
Marseille, laboratoire national du deuxième quinquennat ?
Emmanuel Macron tangente globalement les 60% (59,83%) dans la cité phocéenne, creusant ici un écart de 19 points avec Marine Le Pen, soit deux points de plus qu’au niveau national. Le nord a basculé et Marseille se réconcilie dans ce second tour sur un vote républicain. Un « front » qui n’a pas été automatique dans le département puisque par exemple Port de Bouc, qui avait placé Jean-Luc Mélenchon en tête le 10 avril, a voté majoritairement Le Pen le 24.
Ce vote majoritaire à Marseille, dans une cité que l’on dit trop facilement rebelle, ne vaut pas approbation enthousiaste, mais il signifie qu’une grande partie de l’électorat de gauche, votant dans le centre et le nord de Marseille a fait la différence entre Le Pen et Macron. La victoire phocéenne est en trompe l’oeil car en nombre de voix et en pourcentage, l’hôte de l’Elysée recule par rapport à 2017 : 187 428 voix contre 202 968 et 64,42%. En revanche Marine Le Pen progresse en voix et en % : 125 800 voix et 40,16% (contre 112 098 et 35,58% des voix en 2017).
Les visites nombreuses du président, son affect affiché pour Marseille et l’OM, et le plan Marseille en grand en ont fait un vote possible et plutôt raisonnable pour des électeurs qui avaient fait passer au premier tour un message d’insatisfaction et de revendications.
« Il nous faudra être bienveillants et respectueux, car notre pays est pétri de tant de doutes et de divisions » a déclaré de Président réélu, Marseille sera le banc d’essai de cet engagement. Il veut faire de Marseille le laboratoire expérimental de sa politique nationale pourra ici tenter de faire la preuve de sa capacité à recoudre les oppositions et à réconcilier la ville avec le pouvoir.
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