La mairie d’Aix-en-Provence a inauguré sa première « rue scolaire ». Ce dispositif interdit l’accès aux véhicules motorisés aux heures d’entrées et de sorties d’écoles pour sécuriser le périmètre d’une rue et réduire la pollution. À Marseille, un projet similaire est dans les tiroirs, mais il piétine.
La mise en vigueur était attendue. Il n’est désormais plus possible de circuler en voiture, ou en deux-roues motorisé, rue des Nations, dans le centre-ville d’Aix-en-Provence, durant les heures d’entrées et de sorties des élèves (8h-8h40 et 16h-16h40) les lundis, mardis, jeudis et vendredis en période scolaire. La Ville vient en effet de pérenniser le dispositif « Rue scolaire » aux abords des trois écoles : Bernard Grassi, Jean Jaurès et Albéric Laurent. Une décision qui devrait réduire localement les différentes pollutions (air, sonore, olfactive) générées par le stationnement “dépose-minute” en heures de pointe.
Depuis lundi 3 avril, une barrière amovible – dont la pose constitue le seul investissement direct sur ce dossier – bloque l’accès des véhicules. L’équipement doté d’un panneau « sens interdit » est surveillé sur les temps de restriction de la circulation par des policiers municipaux. Ils joueront un rôle de médiateur pendant un mois, histoire d’accompagner les premiers pas du dispositif. « Cette opération de rue scolaire vise à faciliter les déplacements des enfants à pieds ou à vélo jusqu’à leur école, dans un souci de meilleure qualité de l’air, et de sécurisation des abords des écoles », renseigne la municipalité.
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Lundi 3 avril, le jour de l’inauguration, la maire d’Aix-en-Provence, Sophie Joissains, ferme symboliquement la barrière pivotante sur les coups de 16 heures. Entourée de plusieurs élus issus de sa majorité, notamment Kayané Bianco, Fabienne Vincent, Sylvain Dijon, Marc Feraud ou encore Eric Chevalier, et de la sénatrice Brigitte Devésa, l’édile félicite les parties prenantes, et se projette. « Cette mesure est appelée à s’étendre autant que possible », indique Sophie Joissains.
Le groupe scolaire Jean Giono et l’école des Granettes pourraient suivre. La municipalité n’envisage toutefois pas de couvrir les 76 écoles aixoises avec l’option “rue scolaire”. Et pour cause, « certaines écoles ne s’y prêtent pas (…) il existe parfois d’autres solutions », explique un élu proche du dossier.
Sans voiture, la fête est plus sûre
Quelques minutes plus tard, c’est la fin des cours. Comme chaque jour, des centaines d’élèves sortent de classe, cartable sur le dos et sourire aux lèvres, pour retrouver leurs parents. Mais cette fois-ci : pas de voiture, ni de scooter à l’horizon. « On respire, sourit Céline, parent d’élève, c’était très important de faire ça dans cette rue étroite, et assez dangereuse (…) Ce serait intéressant d’étendre à d’autres rues si les solutions de stationnement le permettent ». Les minots n’ont aujourd’hui plus à se soucier de la circulation automobile, et s’approprient la rue librement.
Rue des Nations, un cas d’école
L’idée est née en 2018, explique la mairie, avec le lancement des plans de déplacement des établissements scolaires (PDES). L’année suivante, des comptages de trafic sont réalisés pour vérifier la faisabilité d’une rue scolaire. Et le résultat est « sans appel » : les pics de pollution sont bien imputables aux dépose-minute devant les écoles. Les différents services de la Ville concernés s’activent alors dans le cadre du programme municipal « Bien vivre à l’école ».
Après deux ans de crise sanitaire, l’année 2022 est finalement celle du grand test. La rue des Nations est retenue comme pilote par les services de la mairie. Située à quelques mètres du parking Pasteur (stationnement gratuit pendant 30 minutes), elle comporte donc trois groupes scolaires. « On a fait l’expérimentation sur une période de quinze jours », se souvient Eric Chevalier, adjoint aixois en charge de la circulation, de la voirie et du stationnement.
Regardez autour de vous, c’est apaisé, les gens discutent. Avant c’était : “Je dépose mon gamin et je pars”
Éric Chevalier
« L’expérimentation a été concluante », revendique l’élu qui souligne particulièrement les résultats obtenus, en avril 2022, en termes d’amélioration de la qualité de l’air. Il commente l’évolution des taux de particules fines : « pendant l’opération, ça chute, et même après, ça reste plus faible que la situation initiale pendant un certain temps ». Aujourd’hui, Eric Chevalier se réjouit que l’opération soit mise en place pour de bon. « Regardez autour de vous, c’est apaisé, les gens discutent. Alors qu’avant c’était : “Je dépose mon gamin et je repars” ».
La Ville évoque un « travail collectif » sur ce dossier, avec une forte implication des équipes pédagogiques, des parents et des partenaires comme le centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) ou l’Unicef. La Métropole Aix-Marseille Provence a elle aussi joué un rôle, signale la mairie. Notamment à travers le projet européen AirDiam’s. L’établissement public a financé l’installation de microcapteurs de la qualité de l’air. Ces modules fournis par l’observatoire régional AtmoSud sont toujours actifs, et le resteront jusqu’au mois de décembre.
Le projet « Rue des enfants » piétine à Marseille
Un peu plus bas sur la carte, du côté de Marseille : aucune “rue scolaire” en vue. Et ce n’est pas faute de demander. Depuis plusieurs années, la population locale réclame avec insistance auprès des institutions publiques, notamment via les réseaux sociaux, la mise en place d’actions similaires pour apaiser les abords d’écoles dans une cité encombrée par la voiture. Ouvert depuis bien longtemps par la nouvelle municipalité Payan, le dossier s’est peu à peu transformé en véritable casse-tête. Et pour cause, la Ville de Marseille ne dispose pas des mêmes compétences que son voisin aixois.
Petits piétons : les chauffards font de la résistance devant les écoles
« Le rapport sur le dispositif “Rue des enfants” (un plan proche du programme “Rue scolaire”, ndlr), je l’ai présenté en février 2021 », nous indique Sophie Guérard, adjointe au maire en charge de la place de l’enfant dans la ville et conseillère métropolitaine, contactée par téléphone. « Nous, on est prêts, poursuit-elle, les gens en ont peut-être marre qu’on dise que c’est la faute de la Métropole, mais comme c’est la réalité, je vais continuer de le dire (…) C’est elle qui pose la barrière et qui fait les aménagements », se défend la directrice d’école.
Le programme marseillais “Rue des enfants” se veut complémentaire aux opérations « Petits piétons », inaugurées en octobre 2021 par la Ville. Contrairement à son alternative aixoise, le dispositif se décline en trois concepts. Il prévoit, selon les problématiques, de procéder à des fermetures dites « pendulaires », comme à Aix-en-Provence, de réaménager certaines voies – en modifiant les trottoirs, en ajoutant un parvis etc. – ou tout simplement, sur des portions étroites et peu fréquentées, d’interdire définitivement la circulation motorisée à l’aide d’une barrière.
J’ai fait ma part du travail. J’espère que les aménagements seront réalisés d’ici septembre.
Sophie Guérard
Parallèlement au “Plan écoles“, la mairie a récemment transmis à l’établissement public présidé par Martine Vassal une liste de 10 rues pilotes, réparties dans sept des huit secteurs de la ville. « Il y a ce fameux courrier qui part à Perrine Prigent (la nouvelle conseillère métropolitaine déléguée à la voirie, ndlr) qui doit le faire remonter (…) J’ai fait ma part du travail, estime Sophie Guérard, j’espère que les aménagements seront réalisés exactement comme on a demandé (…) d’ici septembre ». Les voies listées dans cette première salve n’ont pas été communiquées.
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